Suite à la hausse des températures intervenues au début de la semaine 19 et à la concomitance de cette hausse avec un régime de fortes précipitations en provenance du NNW [nord, nord-ouest, on présume], la fonte du manteau neigeux hérité des intempéries de février a fortement contribué à l'augmentation des débits torrentiels et cela surtout en rive droite de la vallée du Rhône (cf. événements des Alpes bernoises et de la Suisse alémanique en général).

Parmi les quelques bassins versant des vallées latérales de la rive gauche du Rhône, celui du torrent du Marais (...) a certainement produit au plus fort de la crue un débit approchain les 10 m3/s. Le tout ne se serait soldé que par quelques débordements d'eau claire si un glissement de terrain (...) n'avait subitement obstrué le cours d'eau à la hauteur de Bendolla. (...) les traces de l'embâcle laissent à penser qu'il y a eu rupture rapide de celui-ci (moins d'une 1/2 heure) et que la vague boueuse est arrivée sur le village après un trajet de 5 minutes.

Extrait de "l'avis géologique sur les intempéries de l'Ascension, Les Laves torrentielles des 12 et 14 mai 1999, Glissement du Marais (commune de Grimentz)", paraphé à Sion le 1er juin de cette même année par notre géologue cantonal, Jean-Daniel Rouiller.

L'enrochement d'environ 7 mètres de haut de la route goudronnée du consortage d'alpage, une pente à 40°, une forte teneur en eau du sous-sol - le nom du torrent du Marais n'est pas fortuit!, fait remarquer le géologue - qui avait d'ailleurs déjà nécessité la construction d'une rangée de drainages à l'aval de cet enrochement, préparaient ainsi le terrain à bien plus qu'un simple démottage.

Décor géologique planté.

Si la zone, telle une éponge, favorisait déjà l'accumulation et l'infiltration de l'eau, la fonte du manteau neigeux hérité des intempéries de fin février s'est conjuguée avec les nombreuses précipitations qui ont suivi pour sursaturer en eau le sous-sol. Ce phénomène attendu par les spécialistes a eu notamment pour effet de réactiver l'ensemble des gros glissement du caton comme cela a été le cas au printemps 1995.

Rigoureux, très rigoureux, l'hiver l'avait été avec 4 mètres 61 de neige au village selon Paulon et 6 mètres 24 à Bendolla selon Jacky! Petit flashback par la même occasion sur les chiffres de l'hiver 94-95.

Scène éclairée à la lumière météorologique. On passe à l'action, la chute. Immédiate.

Sans la route, les dégâts auraient sans doute étaient moindres. Cette dernière, mais surtout l'enrochement (rempli à l'arrière d'un tout-venant à première vue peu perméable) ont agi comme un bandeau qui a mis en charge l'aquifère superficiel avec pour conséquence l'effet bouchon qui a arraché quasi instantanément 7'000m3 de matériaux meuble.

Cet effet bouchon, par rétention - ce qui est plutôt le rôle de notre barrage - a ouvert la voie à une sorte d'explosion plutôt qu'un bête glissement lymphatique. En d'autres mots, la présence de l'enrochement est la cause directe de l'ampleur et de la soudaineté du phénomène.

La suite, nous la connaissons, nous la vivons encore au fond de nos mémoires. 2 hommes sur le pont n'eurent que le temps de se jeter de côté lorsque, dans la nuit tombante, ils réalisaient soudain ce qui était entrain de se passer. Quelques minutes plus tard, 2 petites filles s'extrayaient par miracle, on imagine dans quel état de frayeur, par l'une des fenêtres de leur logis à demi emporté.

Il y a 10 ans déjà, c'était la catastrophe du torrent. Personne ne savait que le pire était pourtant encore à venir...